
Professeure d’anglais en retraite, Jeanine, âgée de soixante-cinq ans, n’a rien d’exaltant dans sa vie bien rangée. Elle est divorcée et vit seule dans sa maison à Rezé, près de Nantes.
Lorsqu’elle était encore en activité, elle a parcouru le monde et maintenant elle voyage au travers des autres. C’est une inconditionnelle de l’accueil des réfugiés, des gens un peu « border-line » qui sont parfois laissés sur le bord de la route …
EXTRAIT
Pourquoi n’a-t-elle jamais commis le moindre vol, le moindre acte de vandalisme dans un quelconque centre commercial, bu d’absinthe, ni tatoué au feutre effaçable un signe idiot sur son poignet, canard humoristique ou croix gammée, pour jouir enfin du plaisir immature d’opposer au monde, sans avoir même besoin pour cela d’écouter sa proposition, un vigoureux « non » ? Pourquoi tant de mères, dès lors qu’elles accèdent à ce titre, semblent n’avoir jamais eu besoin d’arpenter les zones marginales de leurs propres cerveaux ? Où Jeanine a-t-elle enfoui sa part sombre, son amertume, sa rancœur ? L’a-t-elle quittée en donnant la vie ?
Jeanine est attirée par les personnes atypiques et elle possède une grande faculté : celle d’amener la conversation avec des inconnus de tous types et sur tous les sujets. Cela l’amène à faire des rencontres variées. Sa route croisera des repris de justice qu’elle hébergera, un homme Syrien voulant faire venir sa famille en France et qui d’ailleurs rejoindra l’armée islamique. Avec son empathie, « open-bar », Jeanine pensera qu’il se sera laissé entraîner car c’était un gentil garçon …
Elle recueille tous les chats errants, offre des crêpes et un verre de cidre aux personnes isolées, se lie d’amitié avec une femme agent immobilier qui connait tout le monde, rencontre Brenda l’américaine, Alvirah l’algérienne etc … Cette sexagénaire a besoin de se sentir utile et en même temps a un besoin sans limites de s’abreuver de la vie des gens.
EXTRAIT
Jeanine exultait. Elle eût été un caniche que sa queue se serait détachée à force de remuer de joie. Elle le savait depuis le premier regard, qu’il dansait, mais où ? Où avait-il dansé ? La réponse du Russe claqua ici comme le nom d’un vainqueur aux Oscars : il avait dansé au Bolchoï de Moscou.
Est-ce de la naïveté, de la curiosité ou un moyen de « s’arranger » avec la vie ? Parce que mise à part cette empathie extérieure débordante, Jeanine fait des cauchemars la nuit, elle parle seule, elle crie dans une vie qu’elle n’a pas.
Ma note : 2/5
Ce que j’en pense…
Dans les courts soixante-cinq chapitres que composent l’histoire des soixante-cinq ans de Jeanine, Blandine Rinkel livre un style d’écriture recherché et joue avec les mots.
Le personnage de sa mère est le fil conducteur du livre, bien sûr, mais je crois entrevoir en filigrane les mots qui décrivent la vie de l’auteure quand elle était plus jeune et ce qu’elle pensait déjà de sa mère.
D’ailleurs, au passage et malgré toute la bienveillance qu’elle accorde à celle-ci, elle ne la rate pas car dans un passage elle l’appelle ma « bovidé de mère ». Des comptes à régler ? Amour ou mépris ?
Ecrire un premier roman n’a pas dû être une tâche évidente pour Blandine Rinkel, surtout quand il s’agit de parler des siens. Malgré le style d’écriture très recherché, je n’ai pas accroché. J’ai plus eu la sensation de l’étalement d’un jugement sur la vie de sa mère et d’entrevoir les mots de la fin entre les lignes : « de toute façon que veux-tu espérer encore ? ».
Je ne me suis pas amusée dans ce roman, peut-être même un peu ennuyée en étant spectatrice de la vie d’une retraitée qui fait tout pour s’en accommoder. Jeanine a une vie qui ressemble à beaucoup d’autres. Elle n’a pas de contrat d’exclusivité, n’en déplaise à sa fille !
Personne ne peut se faire juge des prétentions des autres ou de leurs non-prétentions. Nous avons tous notre propre seuil de réussite ou d’originalité qu’il n’est pas toujours aisé d’atteindre Beaucoup d’éléments extérieurs entrent en ligne de compte.
Quelle sera votre vie, Blandine Rinkel, lorsque vous serez une retraitée écrivaine … ou pas ?
L’Abandon des prétentions
Auteure : Blandine Rinkel
Editions : Fayard
Publication : Janvier 2017
ISBN 10 : 2213701903
ISBN 13 : 978-2213701905
Nombre de pages : 248
Catégories :Premier roman Roman biographique
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